Découvrez notre entretien avec Lee Winter pour son nouveau roman lesbien traduit en français : L’Impitoyable Vérité
Bonjour Lee Winter, nous sommes très heureuses de proposer la traduction de ton roman L’impitoyable Vérité (The Brutal Truth en anglais). Peux-tu le présenter à nos lectrices et lecteurs ?
Bonjour à tous ! L’Impitoyable Vérité raconte l’histoire d’une journaliste australienne qui a le mal du pays et qui vit à New York. Elle passe de l’aversion au coup de foudre pour sa patronne, une magnate des médias qui vient de racheter son journal. Mais le destin du véritable désir ne se fait jamais sans heurts et les reines de glace vont être glacées ! Cette pauvre journaliste passe par une sacrée tempête d’émotions !
Le livre est sorti en 2017, mais reste très populaire dans sa version anglaise, n’est-ce pas ?
C’est définitivement mon livre le plus populaire, juste un peu devant Se Prendre au Jeu. Il a de nombreux fans.
Lorsque Jae, une autrice populaire de romans lesbiens, a organisé un sondage dans son groupe Facebook en demandant à tout le monde de voter pour une romance lesbienne à lire absolument, environ 6 000 lectrices ont proposé en premier choix L’Impitoyable Vérité. Le roman est arrivé en deuxième position ! Cela me surprend encore aujourd’hui.
Entretien avec Lee Winter : une femme qui adore les reines de glace : Ice Queens
Avant d’aborder les questions plus spécifiques, qu’est-ce qui te fait tant aimer les reines de glace ? Pourquoi sont-elles des héroïnes parfaites pour toi ?
J’adore écrire sur les reines de glace fictives pour une raison simple : je les aime aussi dans la vraie vie. Je vis avec une reine de glace ! Il y a quelque chose de délicieux dans une femme impressionnante, impérieuse et froide qui fond pour une seule personne et qui permet à cette personne spéciale de voir ce qui se trouve au-delà de ses hauts murs.
Une fois, j’ai essayé de lire un livre qui n’était pas celui d’une reine de glace et j’ai échoué à cause de mon ennui total. J’ai perdu tout intérêt. Maintenant, j’embrasse ce que j’aime et je m’y tiens.
Peux-tu nous présenter Maddie Grey, qui est un rayon de soleil, et pas seulement parce qu’elle est australienne ?
Maddie Grey est une bonne journaliste, mais elle est malheureuse à New York parce qu’elle travaille de nuit, qu’elle n’a pas d’autres amis que son copain d’enfance avec qui elle partage un appartement, et qu’elle a TELLEMENT le mal du pays. Elle pensait vivre un rêve, après tout, tout le monde parle d’aller à New York, n’est-ce pas ? Eh bien, elle découvre vite qu’elle préférerait retourner en Australie, merci beaucoup.
Sa seule lueur d’espoir dans ce monde gris et triste, c’est d’être fascinée par Elena, la magnate des médias qui a racheté le journal et qui s’est installée dans le bureau près de celui de Maddie. Elena travaille tard, elle aussi, et Maddie noue une amitié improbable avec cette femme réservée, car elle voit au-delà de sa froideur qui n’est qu’une façade.
Elena Bartell, la plus Ice queen des Ice Queens…
Au début du livre, Elena Bartell semble être une reine de glace encore plus difficile à atteindre qu’Elizabeth Thornton dans Se Prendre au Jeu et Amelia Duxton dans Jeux de Pouvoir, n’est-ce pas ?
C’est drôle que tu mentionnes Elizabeth Thornton. Mes lectrices et lecteurs se demandent depuis longtemps si elle est vraiment une reine de glace, parce qu’elle a beaucoup d’amis avec qui elle socialise, même si elle reste sur ses gardes. Je soutiens qu’elle est une reine de glace pour les Américains qui perçoivent sa réserve britannique glaciale comme une impolitesse. Et elle n’est pas une reine de glace pour les Européens qui ont l’habitude de voir des Britanniques distants et qui ne la considèrent pas automatiquement comme impolie.
Amelia est née comme ça, elle n’est pas renfermée sur elle-même pour des raisons émotionnelles. Elle ne comprend vraiment pas l’intérêt d’être aimable avec tout le monde ou de mentir pour arrondir les angles en société. Elle est franche et directe et ne supporte pas les imbéciles avec plaisir.
Il ne reste plus qu’Elena, qui est de loin la plus acariâtre des trois. Un cas d’école de reine de glace qui remporte facilement ce titre.
Toutes les vérités ne sont pas bonnes à dire et à entendre pour Maddie et Elena…
Ce roman parle beaucoup des mensonges que nous nous racontons à nous-mêmes. Peux-tu nous en dire un peu plus sur les mensonges de Maddie et d’Elena ?
Elena se ment souvent à elle-même (et à tout le monde), arguant qu’elle ne veut que la vérité. Mais personne ne veut jamais vraiment toute la vérité.
Veut-on vraiment savoir toutes les fois où un employé est en colère contre soi ou toutes les fois où quelqu’un a des pensées déplacées à son égard ? En matière de relations, connaître toute la vérité peut s’avérer désastreux si l’on n’est pas préparé à l’entendre.
Maddie se ment également à elle-même. Elle aime prétendre qu’elle admire sa patronne et que c’est pour cela qu’elle passe autant de temps à penser à elle. Mais elle sait que c’est un mensonge. Elle sait qu’elle devrait probablement partir et trouver un meilleur travail, plus adapté à ses compétences, mais cela signifierait aussi ne plus être auprès de la patronne pour laquelle elle n’a absolument pas le béguin… (Bon, d’accord : elle a carrément le béguin pour elle.) Mais c’est tout à fait sain et acceptable d’avoir le béguin tant que personne ne vient exiger de vous la vérité, n’est-ce pas ?
Entretien avec Lee Winter et la question du slow burn lesbien…
Les mois passent, Elena et Maddie se croisent, mais à un moment donné, elles cessent de se voir quotidiennement. Était-il nécessaire d’étirer le temps de cette manière pour construire l’histoire et les personnages ? C’est le summum du slow burn, non ?
Il est très courant dans les romances d’avoir une rupture au bout de 70 %, où les personnages sont déchirés avant de se retrouver. Parfois, il s’agit d’une rupture artificielle, imposée à l’intrigue pour cocher une case, et les lectrices et lecteurs détestent cela.
J’ai pensé qu’il serait intéressant que mes personnages principaux soient séparés pour d’autres raisons, externes. Il n’y a pas de rupture, mais ils passent du temps séparés tout en apprenant à se connaître par courrier électronique et en s’aimant de plus en plus. Cela permet aux lectrices et lecteurs de souffler un peu. Et puis, il y a beaucoup d’humour dans l’exaspération et l’impatience d’Elena qui attend le retour de Maddie.
Une autrice qui pioche dans son expérience en tant que journaliste…
En tant qu’ancienne journaliste, as-tu puisé dans ton expérience pour présenter la carrière et les aspirations de Maddie ?
C’est mon livre le plus autobiographique. Lorsque j’avais dix-neuf ans, le journal pour lequel je travaillais m’a envoyée de Brisbane à Melbourne pour travailler dans un bureau de presse. J’ai été affectée à l’équipe de nuit.
C’était ennuyeux, fatigant et je n’avais pas d’amis (j’étais la seule personne dans cette partie du bureau à travailler aussi tard). Comme c’était la première fois que je quittais la maison, mes amis et ma famille me manquaient terriblement. J’avais le mal du pays.
Dans le livre, Maddie écrit un billet de blog où elle parle de ses amis restés au pays qui avaient promis de lui rendre visite à New York et qui ne l’ont jamais fait. Son état émotionnel était tout à fait réel et provenait de ma propre expérience.
En plus, contrairement à Maddie, je n’avais pas de patronne sexy dont je pouvais tomber amoureuse pour oublier mon minable travail !
Felicity Simmons, un personnage secondaire détestable ou captivant ?
Toutes nos lectrices francophones qui ont lu le livre sont tombées amoureuses de Felicity Simmons. Est-ce également le cas dans d’autres pays ? Est-ce la raison pour laquelle tu as dû lui donner son propre livre ?
C’est merveilleux à entendre ! Merci aux lectrices et lecteurs français.es ! J’ai remarqué que Felicity est un personnage très clivant. Les lectrices et lecteurs ont tendance soit à l’aimer, soit à la détester. Il est intéressant de noter que moins de personnes sont tombées amoureuses d’elle aux États-Unis que dans beaucoup d’autres pays.
Je pense que les États-Unis, avec leur mentalité de service à la clientèle où la politesse est de rigueur, ont trouvé Felicity impardonnablement grossière avec sa façon de débiter les choses horribles ou brutales qui lui passent par la tête.
Je trouve que les Britanniques, les Australiens, les Allemands et maintenant les Français (merci !) semblent trouver son absence de filtre ou de censure incroyablement drôle et libérateur. Ce qui est merveilleux.
Cela m’a aidé à écrire plus tard une nouvelle sur elle (Five Times Felicity Met Elena dans mon anthologie Sliced Ice) qui l’a beaucoup humanisée et qui explique correctement son état d’esprit axé sur sa carrière. Cela a convaincu beaucoup d’Américaines et d’Américains qui pensaient qu’elle était tout simplement horrible avant. Aujourd’hui, elle est également appréciée par nombre d’entre eux.
Personnellement, je trouve que Felicity est l’un des personnages les plus drôles que j’aie jamais écrits. Certaines personnes sont si involontairement horribles qu’on ne peut s’empêcher de rire.
Les lectrices françaises adorent ton travail et sont tombées sous le charme de vos Reines de glace. As-tu un petit message à leur adresser ?
J’adore mes lectrices et lecteurs français.es ! Je les adore vraiment. Je reçois aussi parfois des courriels de leur part et leurs questions sont toujours très intelligentes. Merci d’aimer mes reines de glace. Je vous aime en retour !
Elena, la Reine des reines de glace, ça va être chaud bouillant ! Mais cette glace aux fruits de la passion, je vais la savourer avec délectation !🥰🥰