La sortie d’une nouvelle romance lesbienne aux éditions Reines de Coeur…
La semaine dernière, nous vous annoncions la sortie du second roman de Marguerite Grimaud baptisé 25 ans et 34 jours. Si vous avez raté l’article, sachez que le livre sera disponible à la fois au format numérique et papier le 18 juin 2024 ! À partir de minuit et 1 minute, comme d’habitude. Mais attention, on ne rogne pas sur son sommeil pour se le procurer. La récupération, c’est important !
Petit rappel du résumé et de la couverture
Avant de vous offrir le petit extrait de 25 ans et 34 jours, retour en arrière. Vous n’avez pas lu le résumé ? Vous ignorez de quoi parle ce roman ? Il s’agit de l’histoire d’amour entre Béatrice et Joséphine. Une histoire qui débute dans les années 90 et continue encore aujourd’hui. Avec de l’amour, de grandes joies, quelques peines, des enfants, de la vie, etc…
Allez, c’est parti pour le résumé !
Le cerisier, Joséphine, la chute…
Victime d’un accident domestique, la célèbre cheffe d’orchestre et pianiste Joséphine Lavallée est opérée en urgence et placée dans un coma artificiel. Alors que les médecins mettent tout en œuvre pour la ramener, son épouse Béatrice Delveaux, scientifique de renom, se remémore les grands et petits moments de leur histoire. Elle revit leur amour, fulgurant dès le premier regard un peu plus de vingt-cinq ans auparavant et dont l’intensité ne s’est jamais démentie.
Malgré l’absence, Béatrice continue à vivre, à travailler, à élever leurs trois enfants, et trouve dans les rencontres du quotidien la force de ne presque jamais baisser les bras.
Dans son deuxième roman 25 ans et 34 jours, mêlant flashbacks et chronique familiale, Marguerite Grimaud dépeint avec force et tendresse l’attente et le doute, mais surtout l’espoir.
Et la fameuse couverture, si vous n’aimez pas les puzzles et les réseaux sociaux.
L’extrait de 25 ans et 34 jours de Marguerite Grimaud
Comme promis, voici le fameux extrait de ce nouveau roman. Entre présent et passé, partez à la rencontre Béatrice et Joséphine.
C’est impressionnant comme les habitudes s’installent. Au troisième jour de ce drame, j’emprunte déjà automatiquement la ligne 6 à Bel-Air, ignorant Nation et la 1 par laquelle je rejoins d’ordinaire mon laboratoire dans le Ve arrondissement.
La rame surgit quand mon téléphone vibre. L’hôpital. Je reste sur le quai.
— Tout va bien. Désolée de vous prévenir aussi tard, mais un signe encourageant conduit les médecins à effectuer une IRM, qui est imminente, et d’autres tests. La docteure Villalba vous donnera les résultats à 18 h 30.
Sabine Pasquier a parlé vite pour m’éviter la panique.
— Un signe encourageant ?
— L’un des hématomes semble se résorber. Il faut vérifier cela. Exceptionnellement, vous ne pourrez pas la voir à midi.
Je manque de bousculer un contrôleur.
— Merci, Sabine. Je préviens la famille.
J’appelle à la maison, Ingrid décroche, transmet la nouvelle. Je laisse un message à Bastien.
Je monte dans la rame suivante, je change à Daumesnil, je sors à Chemin Vert. La pluie a faibli. Mes pas m’amènent directement près du banc où Joséphine et moi nous sommes parlé pour la première fois. Je m’assieds sans me soucier de l’humidité, je ne veux me souvenir que de la chaleur de ce matin de juin 1993.
À l’École normale supérieure, je fréquentais beaucoup la bibliothèque de biologie, mais j’aimais aussi m’exiler dans un lieu que je gardais jalousement secret : la Bibliothèque historique de la Ville de Paris. En ce début d’été 1993, plus qu’un endroit où réviser, c’était mon refuge. J’étais admissible à l’agrégation. Je bûchais mon oral.
J’avais étudié d’arrache-pied tout au long de l’année. Je devais réussir dès la première tentative afin de commencer ma thèse dans les meilleures conditions en profitant de ma dernière année à l’École normale, mais il fallait quitter le logement dont j’avais joui pendant deux ans pour laisser la place à d’autres. Bastien m’avait trouvé un studio non loin du sien. Il serait disponible le 1er septembre. Mes parents n’étaient pas encore au courant, ils pensaient me voir revenir à Saint-Germain-en-Laye. Ils rêvaient de mariage et d’un emploi « convenable » selon leurs critères, et le métier de chercheuse n’en faisait pas partie.
Je m’apprêtais à me battre pour mes libertés, cependant, pour l’heure, j’étais plongée dans les affres de mon oral. J’étais prête pour cette redoutable épreuve même si je n’étais pas à l’abri d’un incident. En ce mois de juin, plus que jamais, j’avais besoin de sérénité. Je fuyais la rue d’Ulm où l’ambiance était détestable de nervosité. Je trouvais dans cette majestueuse bibliothèque du IVe arrondissement calme et distance.
J’ai aperçu Joséphine pour la première fois le 21 juin. Ce matin-là, je m’étais accordé un détour par la rue Malher, non loin, pour acheter de la guimauve qui pendait paresseusement dans la vitrine d’une confiserie aujourd’hui disparue. J’avais baguenaudé en la savourant. Quand j’étais arrivée à la bibliothèque, l’homme à l’accueil m’avait informée que la grande salle était complète et m’avait dirigée vers un angle isolé de l’édifice, meublé de quatre larges tables destinées à la lecture des plans.
Elle était à la première table, moi, deux derrière elle. Je ne l’avais pas remarquée en entrant. Une fois assise, j’ai été attirée par la cadence de sa main gauche. Mon inconnue n’écrivait pas, elle griffonnait en ramassant régulièrement une longue mèche blonde échappée d’une natte. En l’observant mieux quand le lecteur devant moi s’est levé, j’ai discerné des portées. Elle noircissait du papier à musique. J’étais habituée aux manuels d’histoire ou d’urbanisme de la capitale, aux manuels de médecine ou aux couvertures écarlates des codes Dalloz compulsés par des étudiants venus, comme moi, chercher de la tranquillité, mais des notes accrochées sur des portées, jamais. Une compositrice ?
Pour la concentration, c’était perdu. J’ai fermé mon livre et mon cahier, je me suis noyée dans la contemplation de ce dos, de cette mèche, de ces mains. Pas longtemps. Elle s’est étirée. Elle a semblé plus grande encore. Elle a rassemblé ses affaires dans un épais cartable noir et s’en est allée. J’ai aperçu son profil dehors. Vision fugace d’une jolie fille, énergique et pressée.
Je l’ai revue le lendemain. Arrivée à l’ouverture, j’avais été placée dans la grande salle, à gauche, place 55. Un quart d’heure plus tard, elle s’est assise à une tablée de moi, dans l’exacte diagonale. J’ai eu le temps de l’apprécier : effectivement, une jolie femme, une très élancée et très jolie femme, très très belle, même. J’étais tout à mon observation quand elle a levé les yeux sur moi. J’ai soutenu son regard quelques secondes et lui ai proposé un sourire qu’elle m’a rendu avant de se concentrer à nouveau sur le contenu de son cartable.
Ce matin-là, ce sourire, loin d’être fugitif, a fait s’envoler une nouvelle nuée de papillons. Je les ai laissés s’affoler avant de décider que je ne pouvais pas lire la même page huit fois de suite sans rien y comprendre. J’ai fait un effort. Quand j’ai levé le nez deux heures plus tard, mon inconnue était encore là, le crayon à papier suspendu dans les airs, les yeux fermés.
Mon cœur s’est emballé, cette femme me plaisait autant qu’elle m’intriguait. Elle s’est remise à griffonner, moi à aligner des formules. Quand j’ai constaté à 16 h 15 que j’avais oublié de déjeuner, elle avait disparu.
Le 23 juin, elle m’a accueillie d’un hochement de tête. Place 62, je lui tournais le dos. Je me suis retournée pour m’assurer qu’elle continuait à m’observer. C’était le cas. Prise sur le fait, elle a rougi. Je lui ai souri, elle est devenue cramoisie.
Le lendemain, je suis arrivée cinq minutes avant l’ouverture, espérant qu’elle ferait de même, mais elle est apparue une heure plus tard. Elle m’a cherchée du regard, m’a trouvée, j’ai répondu à son salut de la main, seulement j’ai été trop timide pour l’aborder. Je suis partie deux heures pour participer à un dernier exercice blanc. Quand elle m’a vue ranger mes affaires, elle a eu une moue de déception.
J’ai passé mon oral le 25 juin, j’étais à l’ouverture de la bibliothèque en début d’après-midi, prétendument pour avancer sur ma thèse, assurément pour retrouver mon inconnue. Elle n’était pas là. J’ai quitté la bibliothèque dépitée après avoir crayonné des formules.
Le lendemain, j’étais la première à entrer, j’ai trompé mon ennui en lisant un recueil d’histoire sur Les Halles, j’ai fini par sortir à 14 h pour aller défiler à la Pride comme je le faisais maintenant tous les ans. J’ai cherché son sourire dans les quelques milliers de participants. En vain. Je suis rentrée tard.
Le dimanche, j’ai dormi, nagé, lu au jardin du Luxembourg, et trouvé le temps long.
J’ai retrouvé mon refuge le lundi, malheureusement elle n’est pas venue. J’ai eu peur qu’elle se soit évaporée. J’ai, encore une fois, regretté de ne pas l’avoir abordée. Je me suis promis de le faire si d’aventure je la retrouvais.
***
29 juin 1993
Dix heures quarante-cinq. Et si elle ne revenait pas ? Je maugrée contre ma timidité, j’ouvre un cahier, le troisième. Ma thèse me passionne déjà, mais je ne parviens pas, ce matin, à m’immerger. J’observe un peu plus attentivement le plafond peint, les étudiants. Je contemple une femme gantée de blanc qui manipule avec mille précautions un manuscrit coincé entre deux bourrelets de velours.
Onze heures. Quand vais-je me résigner à partir ? Encore une heure, peut-être deux… Je ferme les yeux, les rouvre : elle vient d’entrer.
Sa robe, ses sandales et sa peau dorée de soleil, tout suggère qu’elle est de retour de week-end. Cette femme est d’une beauté à couper le souffle, en tout cas le mien.
Elle me cherche, me trouve, s’illumine. Je suis place 37, près d’une fenêtre. Elle s’arrête à la table avant la mienne : elle me tournera le dos. Pourtant, elle ne s’installe pas, passe devant moi sans me prêter plus attention, se dirige vers la sortie. J’achève d’écrire une formule, mon crayon à papier glisse de mes doigts. Il est temps de découvrir qui est cette belle inconnue, je recule ma chaise.
C’est inutile, elle revient vers moi, laisse tomber son cartable en face de moi, s’assied, ouvre un épais volume, me lance un bonjour silencieux. Aurait-elle demandé à changer de place ? Elle tire un lecteur de CD argenté d’une poche du cartable, pose les écouteurs sur ses oreilles, appuie sur un bouton et relève l’épais volume ; c’est un traité de musicologie.
Je me réinstalle, amusée. Je fais mine d’être captivée par mes écrits, elle m’observe avec insistance par-dessus son ouvrage. Dès que je lève les yeux, je suis aspirée par ses iris verts. Au bout de cinq minutes de ce manège, je lâche mon crayon, elle baisse le livre, je fonds. Je trouve l’adjectif que je cherche depuis des jours pour qualifier son sourire : espiègle. Mon inconnue a le sourire espiègle.
Je lui fais signe d’enlever ses écouteurs. Elle marque un flegmatique temps d’arrêt, juste assez pour que je hausse les sourcils. Elle feint l’étonnement, obtempère en appuyant théâtralement sur le bouton-stop de son discman, quitte ses écouteurs.
— Oui ? chuchote-t-elle.
— Je capitule.
Je lui désigne la porte, je sors en faisant un terrible effort pour ne pas me retourner. J’attends un court instant, sa démarche nonchalante me tourne les sangs.
— Mais qui êtes-vous donc pour m’arracher à mon intense travail ?
Sa voix rauque et voilée me subjugue un peu plus.
— Béatrice Delveaux. Et vous, qui êtes-vous donc ? La place qui vous avait été attribuée ne vous convenait pas ?
— Joséphine Lavallée. J’ai dit que la personne en face de moi mâchait trop frénétiquement un chewing-gum. J’ai suggéré le numéro qui vous fait face. C’est pratique, le plan à l’accueil.
— Pauvre homme.
— J’avais, en effet, affaire à un ruminant. En temps normal, ça ne m’aurait pas dérangée, mais je me suis fait un serment pendant le week-end.
— Importuner une inconnue ?
— Exactement. Ce que vous vous apprêtiez à faire aussi, non ? Vous vous êtes levée pour que je vous suive.
— Je m’étais promis de vous parler si vous reveniez.
— Un premier point d’accord. Nous commençons sous les meilleurs auspices. Je peux vous offrir un verre ?
— Avec plaisir.
Rendez-vous le 18 Juin prochain !
Vous avez aimé cet extrait ? Il vous a donné envie d’en savoir plus ? Rendez-vous le 18 Juin prochain pour la sortie de cette belle et nouvelle romance signée Marguerite Grimaud.
La couverture est une envolée magnifique. Le combo « Pop-corn salé » et « La symphonie des éclairs « . Je me répète, mais bon, c’est ce qu’elle m’inspire.
L’extrait : je fonds ; il me renvoie à Paris, ma ville chérie et dans ses merveilleuses grandes bibliothèques que j’ai fréquentées ou découvertes. Là, le silence est d’or mais parfois propice à la parole des regards comme nous y invite Marguerite