Découvrez l’interview de TB Markinson et Miranda MacLeod
Bonjour TB et Miranda. Le public français vous découvre avec cette première traduction. Pouvez-vous vous présenter et nous parler un peu de votre parcours ?
TB : Je suis une écrivaine américaine basée dans le Massachusetts. J’ai eu la chance de voyager dans le monde entier, et j’ai même vécu en Grande-Bretagne pendant six ans et en Irlande pendant dix-huit mois. Lorsque je n’écris pas, je visite des sites historiques en Nouvelle-Angleterre, je regarde du sport à la télévision, je fais de la randonnée ou je lis. Pas nécessairement dans cet ordre.
Miranda : Je pense que si être étudiante à plein temps était un choix de carrière, je n’aurais peut-être jamais quitté l’école. J’ai passé les vingt premières années de ma vie à tout étudier, de la théologie à la conception de costumes en passant par le commerce. Pendant cette période, j’ai fait beaucoup de missions temporaires dans des bureaux, ce qui m’a exposée à de nombreux types de personnes et à des carrières possibles pour mes personnages. Mais c’est de loin l’écriture qui me passionne. J’ai publié deux douzaines de livres depuis 2016, et je suis tellement honorée que les lectrices et lecteurs apprécient ce que j’écris.
TB : Ensemble, nous sommes copropriétaires du site web I Heart SapphFic. Il est dédié à la fiction saphique et possède une base de données de plus de 6 000 livres lesbiens.
Une rencontre très ancienne…
Comment vous êtes-vous rencontrées et comment fonctionne l’écriture en commun ? Est-ce compliqué ?
Miranda : En fait, nous nous sommes rencontrées pendant notre enfance. Nous sommes nées dans le même hôpital, à 9 semaines d’intervalle. Je dois toujours corriger TB qui s’imagine que c’est 7 semaines, car elle est connue pour être notoirement mauvaise avec les chiffres.
TB : Notre amitié de toujours nous aide et nous gêne dans notre processus d’écriture. Nous nous connaissons suffisamment pour nous dire exactement ce que nous pensons. La plupart du temps, c’est une bonne chose, mais cela peut aussi donner lieu à des disputes. Nous dirions que, dans l’ensemble, c’est une bonne chose d’être aussi honnête l’une avec l’autre.
Pouvez-vous nous parler de L’Avocate du Diable, votre roman publié aujourd’hui ? Quel en est le sujet, comment l’idée vous est-elle venue ?
TB : L’histoire est celle de deux avocates issues de milieux très différents. Nous aimons toutes les deux le thème des opposés qui s’attirent, associé à de la proximité forcée. C’est très amusant de faire travailler ensemble, sur un projet, deux personnes qui ne se supportent pas. Cela donne lieu à beaucoup d’amusement et de sarcasme.
Présentation du roman l’Avocate du Diable
Pouvez-vous nous présenter vos deux héroïnes, Ash et Caitlyn, et nous parler de leurs différences ? Et aussi de leurs similitudes ?
Miranda : La plus grande différence entre les deux est leur situation économique et familiale. Ash vient d’une famille ouvrière de Boston et elle a dû faire beaucoup de sacrifices pour arriver là où elle est aujourd’hui. Caitlyn a eu une enfance privilégiée et a grandi avec de l’argent.
Cependant, Ash a une famille plus aimante, même si elle la rend folle. La mère de Caitlyn est morte durant l’accouchement et son père n’a pas pu le supporter, il a donc confié Caitlyn à une nounou. Même si la nounou aimait Caitlyn comme sa propre enfant, le fait d’avoir été abandonnée si jeune a laissé des traces sur Caitlyn.
Elles ont toutes deux été influencées par leur milieu et pensent qu’elles ne peuvent pas s’entendre à cause de ces différences.
Dans cette histoire, vous vous concentrez beaucoup sur les classes sociales et sur l’opposition entre la famille d’Ash et celle de Caitlyn. Pourquoi ce sujet vous tient-il à cœur ?
TB : Croire que personne ne peut comprendre votre situation est un piège dans lequel beaucoup de gens tombent. Tout le monde a un bagage personnel. Souvent, cela peut donner l’impression d’être complètement seul. En réalité, même si personne n’a vécu exactement la même chose que vous, il est possible qu’une personne que vous pensez très différente de vous puisse s’identifier à vous d’une manière ou d’une autre.
S’ouvrir et permettre à quelqu’un de voir ses blessures rend vulnérable, ce qui explique pourquoi il est si difficile de le faire. Pourtant, être vulnérable peut s’avérer marquant. Pas seulement pour l’histoire, mais dans la vie réelle. C’est ainsi que l’on crée des liens réels et durables.
Dans cette interview de TB Markinson et Miranda MacLeod découvrez leurs héroïnes avec de nombreuses failles…
Le passé de vos personnages et leurs relations avec leurs familles sont extrêmement bien documentés, ce qui nous permet de les comprendre parfaitement. Est-ce quelque chose de très important pour vous dans la construction d’une romance ?
TB : Nous trouvons les personnages parfaits ennuyeux parce que dans la vie réelle, la perfection est une illusion. Il est important pour nous d’écrire des personnages qui ont de la profondeur. Il est plus facile de s’identifier à des personnages qui peuvent être à la ramasse dans certaines parties de leur vie, mais qui peuvent aussi être bien équilibrés dans d’autres domaines. C’est ce qui nous rend humains.
Nous voulons que les lectrices et lecteurs apprennent à connaître les personnages, le bon, le mauvais et le laid, parce que nous croyons que la beauté se cache sous le désordre. Si vous pouvez trouver quelqu’un qui aime non seulement vos bons côtés, mais aussi vos mauvais côtés, c’est ça le véritable amour.
Nous apprécions également quand le second personnage représente la clé des problèmes de l’autre. Non seulement c’est encore plus gratifiant lorsqu’ils finissent par se retrouver, mais cela rend la lecture passionnante. En effet, les lectrices et lecteurs rassemblent les pièces du puzzle et s’écrient : « Vous êtes parfaits l’un pour l’autre ! »
Vous abordez le sujet des laboratoires pharmaceutiques et de la crise des opioïdes aux États-Unis. Avez-vous été personnellement touchée ? A-t-il été difficile de faire des recherches ?
Miranda : La toxicomanie est très répandue aux États-Unis. Bien que nous n’ayons pas été touchées personnellement par la crise des opioïdes, nous avons toutes deux eu des amis, de la famille et des proches qui ont lutté contre une forme ou une autre d’addiction. C’est déchirant, mais c’est aussi très compréhensible pour beaucoup.
Nous pensons qu’il est important d’intégrer les problèmes du monde réel dans nos histoires. Les lectrices et lecteurs veulent pouvoir se reconnaître dans les histoires. Et beaucoup d’entre elles et eux sont confrontés à la toxicomanie ou ont quelqu’un qui l’est.
L’importance des recherches et de la documentation
Tout l’aspect juridique semble très bien documenté et correspond à la réalité. Connaissez-vous bien le système juridique ? Les procédures ont-elles été difficiles à étudier ?
TB : Nous ne sommes pas avocates et, heureusement, nous n’avons pas eu beaucoup d’expérience avec les salles d’audience. Mais nous aimons tous les deux faire des recherches. Je ne cesse de faire des recherches jusqu’à ce que Miranda me dise d’arrêter. Nous avons pu trouver des cas similaires que nous avons étudiés pour les besoins de notre histoire.
Vos dialogues sont très vifs, et dès le début, Ash et Caitlyn font preuve d’esprit et de mordant. A-t-il été difficile de créer une telle dynamique ?
TB : J’adore les dialogues. En fait, j’écris le premier jet et souvent, lorsque Miranda le lit, il s’agit essentiellement de dialogues.
J’ai grandi en regardant les comédies loufoques des années 1930 et 1940, car j’adore les dialogues pleins d’esprit. Ces films ont été de merveilleux professeurs. Non seulement l’humour vous fait rire, mais vous en apprenez aussi beaucoup sur la personnalité et l’histoire des personnages.
Miranda : Je suis connue pour mon humour grinçant, je peaufine donc les dialogues pour ajouter des répliques qui feront rire les lectrices lecteurs à gorge déployée.
L’évolution de la relation entre Ashley et Caitlyn
Vos deux héroïnes sont d’abord attirées l’une par l’autre, puis elles apprennent à se connaître et enfin elles tombent amoureuses. Le passage d’un sentiment à l’autre est-il difficile à écrire ? Quelle est votre phase préférée ?
TB : C’est une question intéressante, car chaque phase est différente, dans une certaine mesure. Il est difficile de dire si l’une d’entre elles est plus agréable, parce qu’en tant que narratrices, nous voulons montrer au lecteur comment ces deux femmes tombent amoureuses.
Bien que chaque étape soit différente, c’est ce que nous avions imaginé dès le départ, donc c’est plus comme une progression naturelle. Cela dit, lorsqu’elles admettent enfin qu’elles s’aiment, c’est toujours très gratifiant !
Est-il juste de dire que Zach est tout ce que nous détestons ?
Miranda : Nous pensons que tout le monde a travaillé avec un Zach à un moment ou à un autre de sa vie. C’est le beau parleur, qui sait comment arriver et s’attribuer tous les mérites alors qu’il ne fait aucun travail. En bref, Zach est une fouine ! Et c’est amusant d’écrire des personnages comme lui parce que nous pouvons nous venger des personnes qui ont mal agi dans notre passé.
Interview TB Markinson et Miranda MacLeod, les autrices se livrent sur les cannoli…
Existe-t-il un livre où l’une des héroïnes parvient enfin à manger des cannoli ?
Miranda : TB est une fan de cannoli et elle essaie d’insérer une scène de cannoli dans chaque livre. Je dois la maîtriser et c’est devenu une plaisanterie en coulisses. D’ailleurs, l’une des expressions préférées de TB est « saint cannoli ». Pour elle, c’est la pâtisserie parfaite.
TB : Si vous vous trouvez un jour dans le quartier North End de Boston, vous devez absolument aller chez Mike’s Pastry pour déguster l’un de leurs cannolis. Vous pourriez même m’y apercevoir en train de me rassasier.
Y a-t-il quelque chose que vous aimeriez dire aux lectrices et lecteurs français qui ne connaissent pas encore votre travail ?
TB : Honnêtement, nous sommes très étonnées que l’un de nos livres ait été traduit en français. Nous avons toujours rêvé d’être écrivaines. Et le fait de savoir que nos livres sont traduits dans différentes langues rend notre carrière encore plus spéciale.