Titre : Dysfonctionnements aux Enfers
Auteure : Seana Landchild
ISBN : pdf : 978-2-37838-145-5 ; ePub : 978-2-37838-143-1 ; mobi : 978-2-37838-144-8
Date de Sortie : 21/07/2020
Nombre de Pages : 104 pages
Résumé :
Depuis des millénaires, les Enfers ne connaissent nul dysfonctionnement. Même le départ d’Hadès, le roi, n’a engendré aucune vague. Les âmes y coulent des jours paisibles, attendant le moment opportun pour se réincarner sur Terre. Eugénie, l’une des gardiennes, a pour principale préoccupation de trouver l’identité de l’admiratrice secrète qui lui envoie des lettres d’amour.
Malheureusement, des problèmes surviennent au Tartare, l’endroit surveillé par Irène où partent les criminels. Elle apprend aux gardiens des Champs Élysées que des âmes y perdent leurs souvenirs. Unique indice : on leur a fait boire l’eau du Léthé, ce fleuve infernal qui efface la mémoire pour permettre à ceux qui le désirent de retourner sur Terre. Mais, les nouveaux amnésiques restent sur place, sans comprendre leur situation.
Alors que la panique s’empare des Enfers, Eugénie mène l’enquête accompagnée de deux de ses collègues, Hector et Philippine. Rejoint par Irène, le trio devra faire preuve de professionnalisme pour oublier le mépris de cette dernière et se concentrer sur leur objectif commun : résoudre le mystère des amnésiques du Léthé.
Seana Landchild signe son premier texte chez Reines de Cœur où elle manie habilement les codes de la mythologique grecque. Cet univers mêle lieux légendaires, divinités en tous genres et enquête sur fond de romance lesbienne.
Extrait :
— Encore un peu de clafoutis ?
Eugénie n’eut pas le temps de refuser que Sophia déposait déjà une part généreuse dans son assiette. Elle voulut échanger un regard d’impuissance avec ses amis, Philippine et Hector, mais ne croisa que les yeux inquisiteurs de Lachésis.
— Est-ce qu’il reste de l’hydromel ? s’enquit-elle en se concentrant sur Sophia.
Cette dernière partit en courant dans sa cuisine, puis revint avec une bouteille au contenu d’or.
— Ma chérie, tu sais bien que nous avons tout l’alcool dont nous rêvons ! De plus, c’est amplement mérité. Vous avez enfin terminé le grand inventaire de l’année, il faut fêter ça !
Sur ces bonnes paroles, elle s’approcha vivement d’Eugénie et remplit son rhyton[1] — certaines habitudes ne se perdaient jamais par-delà la mort. Sophia se tourna vers ses rossignols et les enjoignit à chanter une énième ballade.
Eugénie sirota son breuvage en observant la maîtresse des lieux. Elle avait remarqué que Sophia ne s’était toujours pas habituée à sa nouvelle existence. L’idée de posséder tout ce qu’elle désirait en un claquement de doigts ne cessait de l’enthousiasmer. Elle appréhendait chaque journée aux Enfers comme si elle venait d’arriver, alors même qu’elle avait péri sur Terre presque deux siècles plus tôt.
Tandis que le chant des oiseaux s’élevait, Eugénie se plongea dans la contemplation du paysage. Sophia avait acquis une imposante demeure, non loin du Léthé[2]. Le fleuve s’écoulait lentement, sans murmurer la moindre parole. Eugénie devait bien admettre que Sophia avait fait le bon choix. En parvenant aux Champs Élysées[3], la plupart des ombres[4] évitaient le cours d’eau, effrayées. Seul le temps leur apprenait à quel point il était important. Bien des braves avaient bu son élixir pour tout oublier et retourner sur Terre. La vie, près de lui, avait la douceur de la soie. Mais Eugénie n’aurait pu s’y installer. Ce temps en suspens lui rappelait ses derniers jours de repos en tant qu’humaine, avant son voyage pour combattre Scylla[5]. À l’époque, elle avait été l’une des rares femmes sur un navire. Sans doute, aussi, la première qu’avait dévorée le monstre.
— Au fait, intervint Lachésis, l’une des trois Moires[6]. Puisque je savais que nous nous retrouverions tous ici, ce soir, j’en ai profité pour demander à Léandre le courrier du jour.
Tous se redressèrent sur leur chaise. La divinité sortit plusieurs enveloppes qu’elle remit aux gardiens[7] des Champs Élysées. Tandis qu’Hector ronchonnait en lisant une relance pour une facture d’électricité, Philippine s’enquit tout en ouvrant une lettre :
— Comment va-t-il, d’ailleurs ?
Lachésis haussa les épaules.
— C’est Léandre, répondit-elle. Aussi travailleur que d’habitude.
Eugénie fit la moue. Elle trouvait étonnant que Lachésis n’ait pas compris la raison pour laquelle Léandre s’enfermait dans le travail. Il avait certes toujours préféré la solitude, mais il y avait une autre raison à cette vie de réclusion. Une simple sortie, ne serait-ce que dans les jardins luxuriants, pouvait se transformer en un véritable calvaire pour lui.
Le secrétaire des Moires avait toujours été allergique aux pollens. Aux Champs Élysées, où le printemps durait toute l’année, il ne pouvait sortir sans avoir les yeux rouges et larmoyants. La dernière fois qu’il s’y était risqué, ils avaient tous été étonnés de voir la quantité de mouchoirs qu’il utilisait en un jour. Se charger de ses trois patronnes et de la communication au sein de cette magnifique section des Enfers lui allait très bien, mais la fatigue commençait à se faire ressentir. Voilà deux siècles qu’il espérait partir en vacances dans le monde des humains, en hiver ou en été. Malheureusement, de moins en moins de mortels laissaient une obole[8] dans la bouche de leurs défunts. Si autrefois ce geste permettait d’accélérer la gestion administrative des ombres qui prenaient cette peine, cette tradition s’était peu à peu perdue. Le salaire des Moires diminuait, de même que celui de leurs subalternes. Philippine et Hector râlaient de temps en temps à ce sujet. Hadès, le roi des Enfers, avait décidé de voyager à la surface avec sa douce Perséphone. Tous avaient remarqué à quel point il en avait eu besoin, tant il nageait dans un burn out dû à l’accumulation du travail et des problèmes de l’univers. Il avait promis qu’il demanderait aux humains de se calmer, de faire don d’offrandes à leurs morts comme jadis. Après avoir fait ses bagages, il avait laissé la gestion de son royaume à Atropos, la plus vieille des Moires, qui avait accueilli la nouvelle avec un certain détachement. À l’époque, ils avaient cru qu’il serait bientôt de retour. Malheureusement, les décennies passant, ils avaient compris qu’Hadès ne rentrerait pas chez lui de sitôt.
Eugénie poussa un profond soupir. Elle fouilla dans ses enveloppes, espérant y dénicher une source de réconfort. Sous l’œil scrutateur de Philippine et d’Hector, elle ouvrit toutes ses lettres, à la recherche d’une feuille noire et d’une écriture blanche, mais ne trouva rien.
Elle entreprit de s’intéresser au reste de son courrier, s’efforçant de ne pas trahir sa déception. Cela faisait bien longtemps que son admiratrice secrète ne lui avait pas adressé le moindre poème, chose qu’elle ne manquait pas de faire depuis des années. Allait-elle bien ?
À ses côtés, Philippine soupira. Elle tenait un parchemin usé, aux bouts rembrunis par des brûlures. Les sourcils d’Eugénie se froncèrent. Elle savait d’où il venait : du Tartare[9].
— C’est de la part d’Irène ? s’enquit Hector.
— Bien sûr que c’est d’elle, répondit Philippine.
Ses yeux se plissèrent à mesure qu’ils parcouraient les lignes à la belle écriture penchée.
— Que dit-elle ?
La gardienne leva une main pour demander le silence. Elle termina sa lecture, puis s’adossa contre son fauteuil.
— Là-bas, ils en sont à leur quinzième cas. Les âmes ne comprennent plus pourquoi elles sont torturées. Ils s’efforcent de leur expliquer qu’elles expient leurs fautes, mais elles ne se rappellent pas leurs méfaits.
Eugénie grimaça. De nombreux criminels, envoyés à leur mort au Tartare, devenaient étrangement amnésiques. Irène, l’une de leurs collègues de cette section des Enfers, avait soumis l’idée d’une mutinerie : ses pensionnaires feignaient sans doute d’avoir perdu leurs souvenirs afin d’échapper ne serait-ce qu’un temps à leur cauchemar. Cependant, Irène avait trouvé dans leur organisme des traces du Léthé. Ces problèmes avaient vu le jour un mois plus tôt. Depuis, les gardiens des Champs Élysées surveillaient leur fleuve, mais ils n’avaient rien remarqué d’anormal.
— Est-ce que nous devrions essayer de joindre Hadès ? s’interrogea Hector, mal à l’aise.
Il y avait une hiérarchie à respecter. Jamais ils n’avaient eu à contacter leur supérieur. Seulement, ils ne se souvenaient pas d’avoir déjà dû affronter pareil mystère.
— Atropos a envoyé des lettres et des e-mails à notre roi, déclara Lachésis avec un petit sourire penaud. Ils sont en communication. Ils trouveront bien quelque chose.
Philippine croisa les bras contre sa poitrine.
— J’ai toute confiance en la patronne mais, pendant ce temps, ils sont débordés au Tartare. Nous devrions peut-être faire quelque chose pour les aider, entre gardiens…
— Laissons-les se débrouiller tout seuls, répliqua Eugénie. Il faut attendre les ordres d’Atropos.
Elle ignora les regards de ses amis et but une nouvelle gorgée d’hydromel. Rien ne la ferait bouger des Champs Élysées. Encore moins pour se rendre au Tartare et croiser Irène. Elle avait le sentiment de l’avoir bien assez vue pour l’éternité à venir.
— Tu as tout à fait raison, approuva Lachésis. Ce serait mal de décider à la place de nos patrons.
La Moire prit son verre et, du bout des doigts, effleura le bras de la gardienne. Elles échangèrent un regard et Eugénie acquiesça, la gorge serrée.
[1] Coupe en forme de corne, de tête animale ou d’homme.
[2] Le Léthé est l’un des mythiques fleuves des Enfers dont l’eau efface les souvenirs de la vie terrestre aux morts qui la boivent.
[3] Dans la mythologie grecque, les héros et autres âmes vertueuses sont envoyés aux champs Élysées après leur mort.
[4] Esprit d’un mort.
[5] Nymphe grecque qui a été transformée par la magicienne Circé, jalouse, en une hideuse créature marine à six têtes. On la trouve en face de Charybde, autre monstre marin, au détroit de Messine.
[6] Les Moires sont la personnification du Destin. Ces divinités sont au nombre de trois : Clotho, Lachésis et Atropos. Nous les retrouvons dans la mythologie romaine en tant que « Parques ».
[7] Il existe des gardiens des Enfers dans la mythologie grecque : Charon, Cerbère. J’ai inventé ceux qui se trouvent dans cette nouvelle.
[8] Ancienne monnaie grecque ; offrande.
[9] Région des Enfers où sont envoyés les criminels pour y expier leurs fautes.
Guillaume (client confirmé) –
L’univers de la Grèce antique, très atypique pour une romance, est particulièrement bien exprimé. La mythologie est très bien décrite et nous replonge dans d’anciens cours d’histoire oubliés. Je trouve que prendre cet univers spécifique comme cadre de cette nouvelle est un pari risqué et audacieux mais totalement rempli. L’intrigue se suit avec délectation aussi bien l’enquête en elle-même que celle amoureuse entre les deux gardiennes. Je regrette juste les anglicismes et les quelques références plus modernes alors que la machine à fil de vie est une très belle trouvaille et correspond pleinement au cadre de l’histoire.
En tous les cas Bravo à cette nouvelle auteure pour son audace, et son talent.
gloubiboulga (client confirmé) –
Bonjour, j’ai bien aimé cette nouvelle. Les personnages sont attachants, l’intrigue bien menée et la modernisation de personnages mythiques originale et amusante. Bravo.
toufik saadi (client confirmé) –
Une agréable lecture dans un univers mythologique modernisé (et c’est souvent drôle). Le mystère est prenant et j’ai aimé suivre les personnages dans cette enquête infernale!
Louarn Benedicte (client confirmé) –
J’ai bien aimé cette nouvelle ,très agréable à lire.
On se laisse vite emmener par l’histoire , son univers et l’enquête, les personnages sont bien décrits . ..et la mythologie est un plus des plus réussi. ..
Harry Potter (client confirmé) –
Pour un premier écrit, Seana Landchild a plutôt bien réussi son pari. Etant fan de mythologie grecque, j’ai bien aimé la façon dont elle a construit son histoire et mis en scène les différents personnages tout du long. L’intrigue est bien menée du début à la fin et nous sommes vite pris dans cette enquête mythologique.
Merci Seana pour cette nouvelle qui mérite le détour ! Merci également à Reines de cœur.
Elise HENAUX-VARVIER (client confirmé) –
Un voyage poétique aux enfers où héroïsme et romantisme se mêlent grâce à la magie des mots dont l’auteure a le secret. Je me suis laissée happer par l’intrigue, l’univers mythologique si bien décrit et la romance dont l’on espère secrètement le dénouement.
Par sa plume fluide et captivante, Seana a la marque des grandes auteures. Merci pour ces moments hors du temps!
Cortin Cecile (client confirmé) –
Mon ressenti sur cette nouvelle : mitigé.
Je me suis pris les pieds dans le fil de l’intrigue, un peu trop emberlificotee à mon goût 🤯
Pourtant le contexte de la mythologie grecque, associé à des bribes modernes est une jolie pirouette humoristique.
Le choix de revenir sur terre pour une nouvelle vie : à méditer !
Les lettres anonymes d’Eugenie embellissent la romance
Un style impeccable !
Cependant la fin me laisse légèrement sur ma faim.
Merci Seana pour cette pièce antique, ainsi que les Reines 🙂🥰🥰
Lucinda (client confirmé) –
C’est une histoire très originale que j’ai pris plaisir à lire. Je le recommande 💯