Éditer ou ne pas éditer : telle est la question !

Romance lesbienne

Reines de Coeur : une maison d’édition lesbienne

Quand nous avons lancé le projet de la maison d’édition lesbienne R2C, nous l’avons fait par amour pour vous. On voulait vous proposer des lectures divertissantes qui vous combleraient de bonheur ! Mais, comme le but de ce blog n’est pas de vous mentir, on l’avoue, le geste purement désintéressé n’existe pas. Nous étions également très contentes à l’idée de lire en avant-première plein d’histoires lesbiennes 😉

Inutile de vous décrire les sauts de joie que nous faisons lorsque nous découvrons une soumission spontanée de tapuscrit. Ou moins spontanée quand il s’agit de concours, mais ça n’enlève rien au plaisir) ! Nous passons à chaque fois par toute une palette d’émotions ! Nous sommes touchées, honorées, émues, extatiques, en bref c’est l’ascenseur émotionnel à tous les coups, sachez-le !

Passé toutes ces émotions, le travail nous rattrape. Éditer ou ne pas éditer ? Ce n’est pas simple… Le but de cet article est de vous montrer un peu plus l’envers du décor. Et notamment, les paramètres auxquels on réfléchit quand on se lance dans un nouveau projet. Et nous avons aussi découvert un autre aspect très désagréable du travail : refuser des textes qui nous plaisent. Paradoxal, n’est-ce pas ? Je vais essayer d’expliquer ça pour que vous compreniez.  

On aime/On n’aime pas

Pas de langue de bois : nous publions seulement des textes que nous aimons ! Mais les choses ne sont pas aussi simples que cela. Car nous ne pouvons pas nous arrêter au fait d’aimer ou de ne pas aimer. En effet, nous essayons d’être les moins subjectives possible. En étudiant la structure du texte et ses qualités objectives (scénario, style, construction…).

Si je n’aime pas, cela ne veut pas dire qu’il en sera pareil pour toutes les lectrices. Il faut donc que je me base sur quelque chose de plus tangible que ça. Même si, bien sûr, il faut que je sois la première séduite et que mon instinct me dise qu’il y a quelque chose à creuser. Comme ce n’est pas possible d’être complètement impartial, nous travaillons en équipe. Ainsi, un texte doit recevoir au moins deux avis favorables des co-créatrices de la maison d’édition lesbienne Reines de Cœur. Voire des trois dans certains cas (pour rappel nous sommes trois co-créatrices).

Alors, on est certaines de ne pas laisser échapper un texte prometteur. Ou de ne pas s’engager pour un texte avec lequel l’une de nous ne serait finalement pas à l’aise. Et donc pas en mesure de porter et soutenir l’auteure et son roman comme il se doit.  

Le professionnel, le diamant brut, ou l’entre-deux ?

Il y a plusieurs sortes de soumissions de tapuscrits. Certaines sont très professionnelles et appliquées. On voit que l’auteure a travaillé son texte avec soin et l’a fait relire à d’autres personnes avant de nous le soumettre. Si l’histoire a un feu vert, c’est bingo. L’édition pourra être « rapide », dans la mesure où le travail a été effectué avec professionnalisme. Peu de choses seront à reprendre.

D’autres histoires sont moins « parfaites ». Elles présentent des défauts (narration, niveau de langue, tics de langages, orthographe, voire même problèmes scénaristiques…). Malgré des défauts, on peut être séduites. Notre intuition peut se réveiller et nous faire sentir qu’on tient entre les mains un texte qui a ce quelque chose en plus. Un « diamant brut ». C’est-à-dire qu’il faudra prévoir du retravail. Mais on estime que l’investissement en vaut la chandelle et que l’histoire gagne à être lue.

L’entre-deux, le choix difficile…

Si je devais indiquer une autre catégorie pour ne pas être trop binaire, je dirais que le plus souvent, nous nous retrouvons dans le cas de figure de l’entre-deux. L’entre-deux, c’est quand un texte présente des qualités ou des aspects prometteurs, mais que la dose de retravail nous paraît importante. Si importante que nous ne sommes pas certaines que ça serait faisable ou que l’auteure pourra comprendre ce que l’on attend d’elle.

Ce sont les textes qui nous donnent le plus de fil à retordre. Que ce soit au niveau du choix d’éditer ou pas, ou ensuite lors du travail. C’est un pari qui peut être gagnant, car l’on découvre et accompagne un talent. Mais qui peut également être risqué, car pouvant mener à l’échec.

En effet, si on se lance avec une auteure, mais que l’on arrive pas à atteindre le niveau souhaité, il n’y aura pas de publication. On ne parle pas seulement de temps perdu. Les espoirs brisés des autrices existent et nous ne sommes pas là pour rendre quiconque malheureux.

Le refus par la force des choses

Comme l’a très bien expliqué Isabelle dans un article précédent, nous lisons avec intérêt vos commentaires, notations et retours et les prenons en compte, notamment lors du choix de nouveaux projets d’édition. Dans le positif (+ de romances, on l’a bien compris ;)). Comme dans le négatif. Si nous sentons qu’un certain type de livres ou d’histoires ne vous plaît pas, nous refuserons à l’avenir les projets similaires. Même s’ils nous plaisent.

Ce n’est pas que nos choix sont dictés par la loi du marché ou des ventes. Simplement, publier un livre est un important travail. A la fois sur les plans temporel et émotionnel. Il serait égoïste et peu honnête de notre part de publier le travail d’une auteure en sachant pertinemment et par avance que les lectrices ou le succès ne seraient pas au rendez-vous.

Une position complexe

Nous sommes là comme une charnière entre nos fidèles lectrices qui attendent certaines choses de nos publications et nos auteures, que nous respectons et que nous souhaitons valoriser et promouvoir au mieux. Il nous faut donc évaluer l’équilibre et la parfaite combinaison entre ces devoirs que nous avons à la fois envers les lectrices et les auteures, et c’est cela qui peut nous amener à refuser des manuscrits qui sont bien écrits, qui ont des qualités indéniables et qui ont même pu, nous, personnellement, nous plaire.

C’est toujours difficile de rédiger des courriers de refus, et, croyez-nous, ça semble encore plus dur lorsqu’il s’agit de rejeter un texte qui nous a plu. C’est un peu le coup du « c’est pas toi, c’est moi » en version éditoriale et c’est un moment désagréable à passer. Ça, c’est ce que j’appellerai le refus « contraint »…  

Des choix difficiles et une prise de risque non négligeable

En espérant que j’aurais un peu mieux réussi à vous expliquer comment on procède et ce qui guide les choix de notre maison d’édition lesbienne. Toute la complexité de notre travail réside en cela : trouver le bon équilibre entre ce que l’on aime et ce que vous allez aimer pour que vous et nos auteures soyez heureuses et satisfaites !

Quoi de mieux quand on est auteure que de découvrir les retours enjoués des lectrices ? Quoi de mieux quand on est lectrice que de lire LE livre lesbien que l’on voulait et de faire un achat dont on est pas déçue ? Et, finalement, quoi de mieux quand on est éditeur d’avoir réussi à faire des heureux des deux côtés ? Ça, c’est ce que j’appelle un triangle (amoureux) gagnant !  

8 Commentaires sur “Éditer ou ne pas éditer : telle est la question !

  1. Alice says:

    En gros, si je comprends bien le rapport de l’édition avec un nouveau tapuscrit, c’est un peu comme une histoire d’amour ? ^^
    Les premiers émois, l’excitation du début… Puis vient la phase de travail, de négociation… parfois ça finit mal (le fameux « c’est pas toi, c’est moi » xD) et c’est la séparation et parfois de très belles fins (voire même de triangle amoureux ! O_o).

    C’est toujours sympa de voir l’envers du décors du coté de la maison d’édition ! Merci ! 🙂

  2. Edwine Morin says:

    Ahaha, c’est une belle analogie en effet ^^
    Tu crois que ça existe le pentagone amoureux, dans l’hypothèse où on adore toutes les trois le livre et que le livre a été écrit par un duo ???
    Avec une imagination comme celle-la, je me demande pourquon ton nom n’apparait pas plus dans les recherches d’ebooks lesbiens de notre boutique 😉

  3. Alice says:

    Le pentagone amoureux ? Je trouvais que le triangle amoureux c’était déjà pas mal… mais je vois qu’on a aucune limite chez R2C ! Je vous souhaite que ça arrive un jour ! 😉

    Et oui, mon nom n’apparait pas beaucoup dans la boutique… mais j’y travaille, j’y travaille… 😉

  4. Edwine Morin says:

    Pour que le pentagone fonctionne, il nous faudrait au moins un roman co-écrit par deux auteures, comme l’idée a l’air de vous inspirer Flore et Clémence… *toussotement peu discret* Je dis ça, je dis rien 😉
    Tu vois Alice, tu n’es pas la seule auteure que j’embête, c’est juste une déformation professionnelle. D’ailleurs, je suis tout bonnement irrécupérable, je me rends à peine compte que le pentagone c’est aussi un truc de sorcières… Visiblement, je ne peux pas m’en empêcher. Fantastique, quand tu nous tiens !!

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