New Heaven : Interview de la romancière Lena Clarke

New Heaven Lena Clarke

Nous sommes réunies aujourd’hui pour la sortie de ton nouveau roman, New Heaven. Peux-tu nous parler de cette nouvelle romance ? De tes héroïnes ?

Alors, New Heaven est à la fois le titre du roman, et à la fois le nom de la ville dans laquelle habite Angelina, mon héroïne. Il s’agit d’une petite ville typiquement américaine, tout le monde connaît tout le monde, et les ragots vont bon train. L’héroïne travaille pendant l’été comme serveuse dans un diner. Même si elle a une vie d’adolescente plutôt banale, elle s’occupe énormément de son neveu. Neveu qui réside avec sa mère, son beau-père, et elle-même.

Un soir, elle aperçoit une voiture en panne sur le bas-côté. Elle décide de venir en aide à sa propriétaire, une nouvelle arrivante en ville prénommée Samantha. Cette première rencontre leur fait à toutes deux une forte impression. Et sera suivie de bien d’autres au cours de ce mois d’août. Une idylle débutera entre elles, quant à la suite, eh bien, il faudra lire pour le découvrir.

Qu’est-ce qui t’a motivé à l’écriture de cette histoire ? D’où tiens-tu ton inspiration ?

C’est une question difficile, parce que si j’y réponds, je dévoile un élément majeur du récit. Pour faire simple, j’avais envie d’écrire sur un certain thème. Et j’avais surtout le personnage d’Angie depuis très longtemps en tête. Son environnement familial, sa personnalité, son passé… ça fait un moment que cette héroïne a élu domicile dans un coin de mon esprit. Du coup, je pense que ça se ressent dans ce récit. Mais ce dernier n’est pas uniquement consacré à son histoire d’amour avec Samantha.

J’ai développé l’histoire en fonction du personnage, et non l’inverse. Comme j’y suis vraiment très attachée, la motivation n’a pas été dure à trouver. Pour ce qui est de l’inspiration, je ne saurais pas l’expliquer. Clairement la ville de New Heaven est inspirée des petites villes qu’on peut trouver dans les séries américaines. De la série Gilmore Girls par exemple. Pour le reste, c’est juste de la réflexion à partir d’une idée de départ.

En général, je me demande surtout ce que j’ai envie de faire vivre à mon héroïne. Comment le lui faire vivre de manière intéressante. Quels thèmes seraient les plus pertinents à aborder étant donné la situation. Quels thèmes moi j’ai envie d’aborder…

Les dialogues entre tes deux héroïnes sont très réussis. C’est une victoire pour toutes les personnes qui n’ont pas de répartie, non ? Ça n’a pas été trop dur à imaginer ?

Déjà, merci ! Et ensuite, je ne sais pas vraiment si on peut parler de victoire. Il est certain que dans la réalité il serait probablement compliqué d’avoir autant de répartie. D’un autre côté, les deux personnages avaient tous deux un fort caractère, donc forcément chaque discussion créait des étincelles. La difficulté n’était pas tellement d’inventer les dialogues, car vraiment c’est ce que je préfère écrire. Plutôt de réussir à canaliser mes héroïnes, et à mener la discussion là où je le désirais.

Bien souvent, aucune des deux ne voulait laisser le dernier mot à l’autre. A vrai dire, je me retrouvais régulièrement à improviser. Et les scènes ne finissaient jamais comme je les avais prévues. Après, forcément, toutes les répliques ne me venaient pas en une seconde. Il m’est arrivé de modifier la même phrase dix fois, vingt fois. Jusqu’à être satisfaite, en particulier pour certaines réponses de Samantha.

Pour être honnête, j’avais beaucoup plus de facilité avec Angelina. Même si paradoxalement, c’était souvent sa faute si mes chapitres se terminaient en improvisation totale.

Sans trop en dévoiler de l’histoire, la plus jeune, Angie est la plus débrouillarde. Malgré son âge, Samantha est moins sûre d’elle et doute souvent. Pourquoi ce choix ?

Parce que justement, on ne s’y attend pas. Au début de l’histoire, on pourrait penser que Samantha va être la « personnalité dominante ». Qu’Angie va se contenter de suivre, de se laisser séduire. Mais je souhaitais réellement qu’elles s’apportent quelque chose l’une à l’autre. De plus, la question de la débrouillardise est à mon sens plus une question de tempérament, que d’âge.

Ce n’est pas parce que Samantha est la plus âgée qu’elle détient toutes les réponses. Ou qu’elle doit se montrer assurée en toutes circonstances. Par contre, et peut-être en raison de son expérience, elle réfléchit davantage. Forcément elle s’inquiète plus facilement, contrairement à Angie qui a tendance à foncer tête baissée.

Il est question de coming out, sans que ce soit au cœur de l’histoire, non plus. D’ailleurs, le neveu d’Angie, prend très bien le fait qu’elle soit amoureuse d’une femme. Peux-tu nous en dire un peu plus ?

Le coming out n’est en effet pas si important que ça dans cette histoire. D’ailleurs, et même si Angie se pose quelques questions sur son orientation sexuelle, au final elle n’essaie pas vraiment de se catégoriser. Samantha est la première personne de qui elle tombe amoureuse. Mais, avant ça, elle n’était pas particulièrement rebutée par les hommes. Au cours de l’histoire, forcément elle se retrouve à devoir parler de cette attirance à certaines personnes. Et donc oui, entre autres à son neveu.

Noah ayant cinq ans, j’ai pensé qu’il n’y avait aucune raison pour que cette confidence passe mal. Après tout, si sa tante lui explique que c’est normal, pourquoi jouerait-il les homophobes ? En tout cas, le coming out n’était vraiment pas un des thèmes que je souhaitais aborder dans ce récit.

À cause de certaines circonstances, mieux valait que Angie et Samantha restent discrètes. Donc ce n’était pas du tout la bonne histoire pour en faire un sujet majeur.

Il y a, un peu après le milieu du livre, un retournement de situation. Celui-ci met la romance entre Angie et Sam en péril. C’était important de leur mettre autant de bâtons dans les roues ?

Avant de répondre à la question, il faut quand même que je précise que ce fameux retournement de situation était la première scène que j’avais imaginée au sujet de ce récit. À la base, la « première » partie du roman n’était pas censée être aussi longue. Et la romance entre Angie et Sam pas aussi avancée.

Du coup, on peut presque dire que c’est involontaire si au final une grosse tuile leur est tombée sur la tête. Je dis presque, car on ne va pas se mentir, les péripéties c’est toujours plaisant à écrire. On apprécie d’autant plus un évènement positif, quand celui-ci a été précédé de quelques contrariétés. Moi en tout cas, j’aime beaucoup faire remonter la pente à mes héroïnes. Mais pour leur faire remonter la pente, forcément il faut qu’elles l’aient descendue auparavant…

Et je suppose que du point de vue du lecteur, une histoire qui ne serait qu’un long fleuve tranquille serait un peu ennuyeuse. Si sur 300 pages, les héroïnes ne font que se jurer un amour éternel, il y a des chances pour que ça lasse. En plus, je pense vraiment que les confronter à quelques péripéties permet de donner plus de profondeur à leurs personnalités, et surtout de s’attacher davantage à elles.

Tu abordes les violences familiales sous deux angles : entre Angie et son beau-père et Sam et son ex. Ce choix est plutôt rare, non ?

Sûrement, en tout cas, pour ce qui est de la violence entre Sam et son ex, c’était un sujet qui me tenait à cœur. Bien souvent dans les romans, et quand il en est question, le « grand méchant » est un homme qui prend l’ascendant sur une « pauvre femme », du coup je trouvais intéressant de montrer que cela pouvait arriver également dans les couples homosexuels. Et surtout que la « victime » n’est pas forcément quelqu’un de faible. Par exemple, ici, Samantha n’a pas du tout une personnalité effacée. Elle est même plutôt séductrice, sûre d’elle la majorité du temps, intelligente…

Je voulais juste casser un peu les clichés, et montrer que ce genre de chose peut arriver à n’importe qui. Car autant il est facile de penser « Si ça m’arrivait, je partirais dès la première fois sans me retourner », autant je pense que dans la réalité les choses sont beaucoup moins simples. Concernant Angie et son beau-père, rassurez-vous, je n’en ai pas fait un personnage qui se fait rouer de coups chaque jour. Elle vit très bien, et n’est pas traumatisée.

En théorie, vous ne sombrerez pas dans le désespoir en découvrant ses aventures.

Combien de temps t-a-t-il fallu pour écrire ce roman assez imposant il faut le dire ?

Je ne sais pas exactement, mais je dirais cinq-six mois. J’ai écrit ce roman en trois fois, alors c’est un peu difficile à quantifier. J’avais commencé à l’écrire juste après avoir envoyé Piégées en mer, puis un mois plus tard, en apprenant que la nouvelle allait être publiée, j’ai décidé de le mettre de côté pour retravailler Par-delà les Astres. Ensuite, je l’ai repris quelques mois plus tard, mais pareil, c’était au moment du concours sur « L’amour au travail », et je l’ai à nouveau laissé de côté pour écrire Faux Semblants.

Quand j’en ai eu fini avec ce dernier, je me suis décidée à enfin terminer ce récit, et nous voici, plus de deux ans après le premier mot écrit… Souvent j’ai douté de réussir à mettre le point final à cette histoire, et c’est donc beaucoup d’émotions de la voir publier aujourd’hui.

Il est difficile de ne pas succomber au charme d’Angie et de Sam. Est-ce qu’on aura la chance de les retrouver un jour, dans une autre histoire ?

Tout à fait. J’aime beaucoup ma petite Angie, et j’avoue que j’étais un peu triste à la fin de New Heaven de me dire que je ne pourrais plus écrire sur elle. Du coup, j’ai décidé qu’elle aurait parfaitement sa place en tant que personnage secondaire dans une autre histoire. Une autre histoire qui normalement sera publiée l’année prochaine, donc si vous avez aimé Angie et Sam, il n’y aura pas trop longtemps à attendre avant de les revoir.

Évidemment, elles n’auront plus un rôle de premier plan, mais au moins, vous pourrez découvrir ce qu’elles sont devenues dix ans plus tard.

Es-tu actuellement en train de travailler sur un nouveau roman ? Peux-tu nous en dire un peu plus sur le sujet ?

En ce moment, je travaille sur un thriller. Un petit groupe d’amis décide de passer le week-end dans un camp situé au beau milieu des bois. Dix ans auparavant, du temps du lycée, ils y ont séjourné à plusieurs reprises. Ce qui était censé être l’occasion de se retrouver, se transformera vite en week-end mortel pour certains. Évidemment, il y aura tout de même une histoire d’amour. Au lycée, l’héroïne sortait en cachette avec une autre fille, mais à cause de certaines complications cette dernière a fini par déménager.

Vous vous en doutez, cette même fille réapparaitra dix ans plus tard. A-t-elle bien fait de revenir ? Aurait-il mieux valu qu’elle laisse des milliers de kilomètres entre ce groupe et elle ? Est-ce que je prévois de la tuer sans aucun scrupule pour briser le cœur de mon héroïne ? Je suppose que tout ça, on le saura le jour où j’arriverais à terminer ce récit…

Que peut-on te souhaiter pour la suite ?

Justement, de réussir à finir ce thriller. Ensuite, d’avoir l’inspiration et la motivation pour écrire toujours plus de romance. Que ces mêmes romances passent à chaque fois le cap de la publication, et bien entendu, qu’elles continuent à vous plaire. Pour faire plus simple, souhaitez-moi juste bon courage pour mes projets. Ce sera déjà très bien, et ça me fera tout autant plaisir !

Un commentaire sur “New Heaven : Interview de la romancière Lena Clarke

  1. Shijin dit:

    Heureuse que le livre sorte enfin ! J’aime beaucoup ces interviews que vous nous proposez, R2C. J’aime en apprendre plus sur les auteures et la création du livre, c’est vraiment cool.

    Ensuite, je suis contente de savoir qu’on pourra recroiser Angie et Sam dans une autre histoire, savoir ce qu’elles sont devenues tout ça, ça fera une belle surprise !

    « Est-ce que je prévois de la tuer sans aucun scrupule pour briser le cœur de mon héroïne ? » cette phrase m’a trop fait rire ! J’attends de voir ce que ça va donner du thriller à la Lena Clarke. Et enfin, je te souhaite plein de courage pour tes projets, pour que tu ais la motivation et l’inspiration pour écrire ! En tout cas, je serai toujours une fan de ton travail (même si un jour une histoire ne passe pas le cap de la publication è_é). Peace !

Laisser un commentaire