Pourquoi la littérature M/M captive un public plus large que la F/F ?

Dans le monde de la littérature LGBTQ+, deux genres se distinguent particulièrement : les romances M/M (masculin/masculin) et F/F (féminin/féminin). Tous deux offrent des représentations précieuses et nécessaires des relations queer, évidemment. Pourtant, une tendance intrigante se dégage. La littérature M/M semble jouir d’une popularité et d’une acceptation plus larges, surtout auprès des lectrices hétérosexuelles, tandis que la littérature F/F peine à conquérir une part de marché similaire. De quoi se poser une question légitime : pourquoi cette différence entre littérature M/M et F/F ?

Émergence des romans queers sur le marché

En effet, le secteur des romances LGBTQ+ connaît une croissance fulgurante aux États-Unis. Selon le New York Times, c’est une augmentation de plus de 740 % au cours des cinq dernières années (bon article, de 2022 mais on sait que ça ne fait que progresser) !

Cet intérêt croissant témoigne d’un changement significatif dans les goûts littéraires. Et aussi, d’une soif grandissante de diversité dans les récits romantiques. Mais au cœur de cette vague queer, il y a une nuance intéressante : les romances M/M tiennent le haut du pavé. En effet, elles attirent un lectorat varié qui dépasse largement les frontières de la communauté LGBTQ+. Alors, qu’est-ce qui rend la littérature M/M particulièrement attrayante pour un public aussi large. Au-delà, pourquoi la littérature F/F ne connaît-elle pas un essor similaire ?

La visibilité et les stéréotypes culturels

L’un des facteurs contributifs est la visibilité et les stéréotypes culturels. Historiquement, les récits homosexuels masculins ont occupé un espace plus visible dans la culture populaire. On peut citer des films de grande envergure comme Le Secret de Brokeback Mountain en passant par Love, Simon ou plus récemment Call Me by Your Name aux séries télévisées comme Heartstopper ou Young Royals. Ce qui offre ainsi une plateforme de familiarisation pour un public plus large, dont les hétérosexuels. Cette représentation accrue, par effet de rebord, augmente l’attrait des lecteurs et lectrices pour des romances M/M. Cela pourrait les rendre plus curieux et ouverts à l’idée d’explorer ces histoires dans la littérature.

En parallèle, la littérature F/F souffre d’une double invisibilité : non seulement les relations lesbiennes sont moins représentées dans les médias grand public, mais quand elles le sont, elles sont souvent entourées de stéréotypes ou reléguées à des niches spécifiques. Le tout peut décourager un public potentiel plus large.

Différence entre littérature M/M et F/F auprès du grand public

Un autre aspect à considérer est la manière dont les lecteurs et lectrices s’identifient aux personnages et aux histoires. Pour de nombreuses lectrices hétérosexuelles, lire des romances M/M peut représenter une forme d’évasion qui s’éloigne de la dynamique traditionnelle des genres. Cela offre un espace où les rapports de pouvoir et les rôles de genre peuvent être repensés ou ignorés, ouvrant la voie à des explorations narratives rafraîchissantes.

Évidemment que la question d’une fétichisation des couples gay se pose. Cette tendance à l’idéalisation ou au fantasme sur les relations entre hommes est au cœur de nombreuses questions « éthiques ». Bien que cette fascination puisse contribuer à l’attrait des romances M/M, elle peut aussi risquer de réduire ces relations à des caricatures stéréotypées, éloignées des réalités vécues par la communauté LGBTQ+. D’ailleurs il est intéressant de voir que certaines romances M/M écrites par des femmes hétérosexuelles véhiculent parfois le cliché dominant/dominé (un homme musclé, à un poste haut placé tombe sous le charme d’un plus jeune, inexpérimenté et plus chétif qui se retrouvera dans un rôle de soumis).

D’autre part, sans un intérêt amoureux principal féminin, il y a moins de chances qu’une lectrice se compare, consciemment ou inconsciemment, à la protagoniste ou s’insère mentalement dans la situation, échappant ainsi aux diktats et stéréotypes féminins parfois bien trop présents dans les romances M/F. Cela permet donc aux lectrices de se concentrer et d’apprécier l’histoire. C’est en tout cas une raison largement avancée dans la communauté Reddit à ce sujet.

Et puis, si on reste basique, une femme hétérosexuelle a deux fois plus de chance de tomber sous le charme des protagonistes dans une romance M/M. Et oui, il y a deux héros ! Deux hommes ! Cela tombe donc sous le sens !

À l’inverse, pour ces mêmes lectrices, les romances F/F peuvent ne pas offrir le même niveau d’évasion ou d’identification. Cela n’implique pas une moindre qualité ou importance de ces œuvres (on l’espère en tout cas). Mais cela souligne comment les préférences personnelles et les perspectives peuvent façonner notre consommation littéraire.

Le rôle des communautés de fans et du marketing

Les communautés de fans et les stratégies de marketing jouent également un rôle majeur dans le succès des genres. Les romances M/M bénéficient souvent d’une communauté de fans très active en ligne. Ces fans sont capables de mobiliser des ressources significatives pour la promotion et le soutien des œuvres et des auteurs et autrices qu’ils et elles aiment. Cette dynamique crée un environnement favorable à la découverte et au bouche-à-oreille.

Un exemple flagrant est le nombre de commentaires et d’avis que peuvent atteindre certaines romances M/M sur différentes plateformes. Cette visibilité majeure est un excellent outil marketing utilisé par les différentes maisons d’édition. A contrario, les romances F/F ont plus de mal à obtenir des équivalents. On s’en rend d’ailleurs compte à notre niveau puisque hormis 6h22 Place 108 de Clémence Albérie et Escorte-moi de Lena Clarke, nos nombreux autres titres, malgré leurs très belles ventes, ne dépassent pas les 20 avis sur notre propre site.

Ainsi, pour la littérature F/F, bien que des communautés de fans dédiées existent et soient passionnément engagées, elles ont souvent moins de visibilité et de ressources pour le marketing. Une réalité qui ralentit la diffusion de ces œuvres auprès d’un public plus large.

Vers un paysage littéraire sans différence entre littérature M/M et F/F

L’ascension fulgurante de la littérature LGBTQ+ est une évolution positive, promettant plus d’inclusivité et de diversité dans les histoires d’amour que nous partageons et célébrons. Cependant, la disparité de popularité entre les romances M/M et F/F soulève des questions importantes sur nos préférences culturelles, nos biais et la manière dont nous valorisons différentes formes d’amour dans l’art.

Pour notre plus grand plaisir ces derniers mois, la littérature F/F semble trouver un nouvel élan avec de nombreuses sorties qui, nous l’espérons, aideront peu à peu à combler cette différence de visibilité.

En continuant à explorer et à soutenir activement une large gamme de voix et de récits dans la littérature LGBTQ+, nous pouvons contribuer à créer un paysage littéraire plus équilibré et représentatif de toutes les nuances de l’amour ! Alors vive les femmes ! Et surtout, découvrez vite nos romans lesbiens !

3 Commentaires sur “Pourquoi la littérature M/M captive un public plus large que la F/F ?

  1. Marguerite Grimaud dit:

    Merci pour ce nouveau post comme toujours passionnant (et pas juste parce que je suis une autrice R2C 😉 Effectivement, il m’est arrivé de parler à des femmes hétéros qui me disent qu’elles ont du mal à tomber sous le charme d’une héroïne lesbienne (ou bi). Intéressant.

  2. Pilpoil75 dit:

    Si des femmes peuvent être intéressés par les romances H/H, je pense qu’il est aussi possible que des hommes soient intéressés par de la littérature F/F C’est mon cas 😉.
    J’apprécie les relations F/F qui éveille mon imaginaire et me permet de repenser une séduction qui, par définition, s’éloigne des stéréotypes patriarcaux et qui est plus égalitaire. Et le catalogue de Reines de Coeur est très varié: par exemple, la trilogie des amazones est un polar particulièrement addictif et méritant des éloges mainstream ou la trilogie aveshan qui s’inspire de Star Strek et renouvelle le Space Opera.
    Concernant le faible nombre d’avis laissé sur le site, je pense que c’est dû à l’impossibilité de laisser des avis quand on a acheté le livre par un autre moyen que le site (salon, ou librairie traditionnelle). De plus, tous vos livres papier ont une version e-book; je pense qu’il est dommage que les avis des 2 versions ne soient pas visibles de façon identique dans les 2 versions.
    Je vous encourage à maintenir vos efforts.

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